Moment où, en faisant ou en disant quelque chose, vous avez le sentiment fulgurant de vous comporter en adulte.« Grandis un peu ! » m’avait lancé un ex par un bel après-midi parce que je faisais trop l’imbécile à son goût (dans les rues basses, en plein samedi après-midi. Je crois qu’à ce moment-là il voulait déjà rompre.) Grandir, d’accord, a priori je n’avais pas le choix. Mais est-ce qu’il fallait nécessairement arrêter de faire la plouc ? Je ne crois pas que le comportement et l’âge, ou que l’insouciance et l’expérience de vie doivent être alignés. Faut dire que j’ai eu de mauvais exemples autour de moi : des jeunes aux idées fanées, de vieilles dames qui ont dansé sur les tables jusqu’à leur ultime pirouette, de grands intellos un peu clown, des jeunes clowns dépressifs… Alors être adulte, d’accord, mais octroyons-nous un peu de souplesse ! À certains moments très précis, j’ai des fulgurances d’ « adultitude », des moments où je me dis « Là, je fais un truc d’adulte ». Pour ce douzième Novelmuttum, je propose de trouver un nom à ce phénomène. Adulte, je le suis. Sur le papier, du moins. J’ai dépassé les 30 ans, j’ai terminé des études, j’ai deux enfants, je me suis même mariée ! Tout cela ne m’empêche pas d’avoir des moments où j’ai l’impression d’usurper cette identité de « grande personne ». J’en vis aussi d’autre – ceux que je propose de nommer – où je me sens jouer à la perfection le rôle de mon âge. Ma vie est un va et vient entre les âges. Et je vais bien, je vous l’assure. Quand j’étais petite, je m’amusais à me projeter dans le « Quand je serai grande ». Une vision, en particulier, me revient : dans cette image, je porte un pantalon blanc en lin, je me trouve dans une cuisine baignée de lumière au mobilier en bois clair et je ris avec un enfant. Si je déconstruis cette image, je me rends compte qu’elle est inspirée par les représentations sur papier glacé des catalogues d’aménagement suédois. Dans une autre image, je me voyais danser comme une dingue, toujours en compagnie d’un enfant. Ma vision de la moi adulte était alors très positive, joyeuse. La moi adulte, je la voyais s’autorisant de la joie et de l’insouciance. Je ne porte pas de blanc (#TeamVisagePale ), je débarrasse peu à peu mon intérieur de « l’art de vivre à la suédoise »(*) mais il m’arrive effectivement de danser comme une dingue dans mon salon avec mes enfants. Claquement de main à la petite moi ! Mission accomplie ! Je peux toutefois comprendre que ma proposition de nommer ce moment du « Là, je suis adulte », évoque à d’autres des instants où, au contraire, on perd son insouciance. Aussi, je précise : il ne s’agit pas de repenser à la prise de conscience des responsabilités pénibles – impôts, courses, intendance, factures, devoirs, obligations… – et de leur répétition infernale mais bien plutôt de considérer avec malice nos fréquents allers-retours entre nos différents âges. Parce que je crois à l’idée selon laquelle beaucoup de nos tensions intimes sont liées à des dissonances entre ce qu’on avait rêvé être, ce que l’on est, ce que l’on pense représenter, ce qu’on pense devoir représenter… Par exemple, il m’arrive, lorsque je suis mal à l’aise dans une situation, de constater que mon malaise vient du fait qu’une plus jeune Lia ou, au contraire, une Lia plus vieille a pris la place de la Lia présente et qu’elle ne se sent pas en conformité avec la situation. Je parle souvent de ma veste de tailleur qui, quand je la mets, fait immédiatement surgir une version de moi qui a environ 12 ans et qui aurait chipé sa veste à une vraie adulte. La Lia de 12 ans pense qu’on ne la prend pas au sérieux, qu’on ne peut pas la prendre au sérieux. En général, la prise de conscience suffit à me faire sourire intérieurement et à dédramatiser le moment. À l’inverse, à 12 ans, une version fantasmée d’une moi adulte venait régulièrement me reprocher mon comportement infantile. « Grandis un peu », me disait-elle... Tiens, c’est drôle… Un autre truc drôle : enfant, je me suis souvent sentie adulte, ou du moins, plus adulte que ce que mon âge pouvait faire croire. Alors qu’aujourd’hui, je suis surprise lorsque j’ai l’impression d’agir en véritable adulte. En tous cas, en ce que je crois être un truc d’adulte. (Pour les psys au fond de la salle, je concède cette reformulation : à agir comme je crois que mes parents l’auraient fait.) Alors oui, ils sont de plus en plus rares, ces moments – peut-être que je deviens adulte malgré tout – cependant, lorsqu’ils surviennent, ils sont les clins d’oeil de ma jeune moi à la moi adulte et ça nous fait toujours autant rire. (*) J’emprunte l’expression à Alex Lutz et Bruno Sanchez dans un de leur sketches avec « Catherine et Liliane ». Moment où, en faisant ou en disant quelque chose, vous avez le sentiment fulgurant de vous comporter en adulte.Postprèse (n. f.)
Ecoutepetimisation (n. f.)
Crameler (verbe)
Apopédie (n. f. – relatif à l’état)
Perapopédie (n. f. – inclut le sentiment de transition)
Instant poivre-et-sel
Adultitude (n. f.)
Goldorité (n. f.)
Matuse (n. f.)
Étanlage (n. m.)
Accomplitude (n. f.)
Adultance (n. f.)
Un immense merci aux cerveaux adultes et à la malice sans âge de Mitch Morin, Ariane Mawaffo, Yvan Peperoni, David Marin, Magali Baillif, Cedric Annen, Zoé de Rudevent et Guillaume Pi !
0 Commentaires
Laisser un réponse. |
À quoi ça blogue?Quand ça passe par ma tête et que ça persiste assez pour être transmis à la main. Catégories
Tous
|