Sentiment de tétanie que l'on ressent lorsqu'on a un temps libre limité à disposition et qu'on se retrouve déchiré·e entre les différentes envies de l’occuper.Je pensais, avec le confinement et l’annulation de l’essentiel de mes activités professionnelles, que je n’allais plus jamais ressentir ce sentiment. Celui pour lequel j’ai proposé la définition de ce sixième Novelmuttum. Pour mieux vous le faire comprendre, je vais devoir livrer ici, au grand jour, l’une de mes névroses. Depuis toujours, je vis avec un emploi du temps très rempli. Ce mode de vie s’est mis en place quand je suivais une formation pré-professionnelle de danseuse, en parallèle avec l’école, les cours de musique et les copains-copines. Dès 12 ans, j’ai pris l’habitude de m’organiser pour réussir à tout faire et à aimer ça ! Plus tard, lorsque de l’espace se libérait dans mon horaire, je le remplissais avec autre chose. Petit à petit, à mesure que j’additionnais les cursus – l’école, la formation de danse, puis, celle de théâtre, l’Uni – le fonctionnement changeait car mes jours n’étaient plus structurés par une seule activité qui englobait l’essentiel de mon temps. Cependant, je continuais à remplir les cases horaires et pour y arriver, je me suis mise à multiplier les activités différentes. Les projets artistiques, l’improvisation théâtrale, une nouvelle formation, des stages, l’implication associative… (Non, les enfants ne sont pas une activité. Mais on peut faire des activités avec les enfants. Et les multiplier… (Les activités, donc…)) Bref, j’ai toujours occupé les cases vides. Jusqu’au moment où je me suis rendue compte que j’avais, dans mon quotidien, de plus en plus de tâches qui me déplaisaient au détriment d’occupations qui pouvaient me motiver. En fait, tout ce qui avait valeur de « plaisir » ou de « détente » ou de simple « temps libre inconditionnel », était repoussé à un « après » hypothétique. Après, quand j’aurai le temps. Tout ceci peut sembler désespérant mais en réalité, il y a quelque chose de l’ordre du moteur dans ce fonctionnement car les projets réjouissants pour ce fameux « après » ne manquent pas et continuent d’apparaître, ce qui donne la motivation de terminer plus vite les tâches non-réjouissantes, non-motivantes, non-valorisantes. Un moteur empoisonné, par contre. Sa capacité à s’auto-alimentater est merveilleuse et, si l’on est embarqué·es dans l’engrenage, presque imperceptible car plus vite une tâche est terminée, plus vite elle laisse du temps libre. Or, quand on a été empoisonné, le réflexe est de remplir au plus vite ce temps libéré par une nouvelle tâche « bof » au lieu d’un moment « Waouh ! ». Mes moments « Waouh ! » à moi sont nombreux… quelque part dans l’avenir. Ça ne fait aucun doute : j’ai développé une créativité extraordinaire pour les activités futures et un sens de l’abnégation digne des plus grands personnages mythologiques pour le moment présent. C’est tout à la fois très beau et pathétique. Je serai formidable… après. Je me reposerai… après. Je regarderai/lirai/relirai/écrirai cela… après. Laissez-moi juste finir ce PV d’Assemblée Générale et les tâches que les autres m’ont laissées (qui sont en réalité le plus souvent des tâches que j’ai récupérées toute seule comme une grande, claquant un dramatique « Je vais le faire moi, ça ira plus vite » ou un simple « Laisse, je m’en occupe ») Je suis une des rares personne à procrastiner le plaisir. Cette petite ( ! ) introspection pour expliquer la nouvelle définition de Novelmuttum. De tout ce qui précède découle le drame suivant : dans les moments où j’obtiens ce fameux « temps libre », je me retrouve le plus souvent complètement paralysée. Parce que toutes ces envies que j’ai mises sous cloche, qu’elles soient créatives, intéressantes, amusantes ou simplement reposantes surgissent toutes à la fois comme autant de diablotins de leurs boîtes. Une soirée à la maison, sans mari ni enfants se transforme rapidement en dilemme cornélien à plusieurs issues et, inévitablement, en tragédie. Super ! Je vais m’affaler devant la télé ! Non, ce serait trop bête. Et si j’ouvrais enfin ce livre ardu qu’on m’a offert ? Non, on avait dit DÉ-TEN-TE ! Alors je pourrais prendre un bain ? Hum, ce ne serait pas assez profiter d’avoir le salon vide… Je sais ! Je vais enfin trier mes photos ! Non, pas assez de temps devant moi, j’ai envie de pouvoir m’y plonger complètement... Systématiquement, ça se termine au refuge, celui que je connais le mieux : le grand et sacro-saint Utile. « Comment s’est passée ta soirée ? » « Oh, ben… j’ai répondu à tous mes mails, j’ai corrigé mon article, j’ai avancé dans ma compta… ». Je vous rassure. Je vais de mieux en mieux. Mais bon sang ! J’étais persuadée que ce syndrome s’atténuerait avec le confinement ! Voici comment j’ai défini ce sentiment : Novelmuttum VI "Sentiment de tétanie que l'on ressent lorsqu'on du temps libre limité à disposition et qu'on se retrouve déchiré·e entre les différentes manières de l’occuper." Parmi les propositions reçues, la première est une expression : · Liberté d’anchois (expression)
· Sautasouhait (n. m.)
· Chronembarras (n. m.)
· Asphyxyvité (n. f.)
· Examinase (n. f.)
· Plurinertie (n. f.)
· Apactivité (n. f.)
· Procrapathie (n. f.)
· Pertrop (n. m.)
· Tempocrasse (n. f.)
· Gdetibil (n. m. ; étym : slave)
Merci de tout cœur à Cédric Chapô Maurouard, Yvan Peperoni, Alexis Baudin, David Marin et Djeemee Gurtner pour vos trouvailles ! Merci aussi à la culture judéo-chrétienne qui a su infuser en moi la culpabilité et l’abnégation nécessaires à l'existence de mes névroses !
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À quoi ça blogue?Quand ça passe par ma tête et que ça persiste assez pour être transmis à la main. Catégories
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