Sentiment qui, lorsque quelque chose est annulé, mêle à la fois un peu de tristesse et à la fois un peu de soulagement.Pendant ma formation de danseuse, il m’arrivait d’envier une collègue qui s’était blessée. Je me disais alors qu’il devait être agréable d’être « forcée » de ne pas danser, sans avoir à formuler le besoin de faire une pause. J’enviais celles qui pouvaient rester assises pendant le cours, voire, pour les plus « chanceuses » ne pas venir du tout ! Je ne voulais pas arrêter la danse, ni évidemment me blesser réellement. Je voulais juste pouvoir souffler sans qu’on puisse me reprochais d’être une flemmarde ou une lâche. J’étais à cette époque au cœur d’une dynamique dans laquelle je m’interdisais de faillir, de montrer la moindre faiblesse. C’était un système où l’on nous faisait croire que les plus braves seront récompensées. Ce n’était pas vrai, évidemment. Plus tard – et là c’est beaucoup plus sympa – j’ai expérimenté la dispense sereine. J’étais enceinte et je me suis vue annuler certains rendez-vous ou certaines sorties avec flegme et confort. Ce n'était pas le fait d'annuler qui me faisait plaisir, mais bien celui de pouvoir le faire pour une raison que je trouvais légitime. Quoi de plus compréhensible qu’une femme enceinte qui décline cette virée en montagne, cette soirée Zumba-Salsa, ce spectacle d’hiver en plein air ou ce déménagement sans ascenseur ? Et quel confort c’était de penser aux autres, douillettement emmitouflée dans un plaid, sur le canapé et ce, sans même s’en vouloir. C’est là le point de départ de ma réflexion sur l’annulation et ses paradoxes. J’ai autant de peine à prendre la décision de renoncer à quelque chose que de soulagement lorsque le quelque chose disparaît pour une raison qui n’est pas de mon ressort. Je parle ici d’événements qui contiennent une charge anxiogène. Il peut s’agir d’une soirée que j’organise et dont la réalisation ne me semble pas prendre la meilleure des directions, ou d’un rendez-vous pour lequel j’ai des appréhensions, d’une prestation dont le contexte me met mal à l’aise ou encore d’une réunion importante mais à fort risque de crise diplomatique. Pourtant, certaines de ces occasions peuvent aussi porter en elles des promesses de beaux moments, de découvertes artistiques, de réconciliations, de rencontres ou de résolutions. Mais la balance entre risques et espoirs est mal équilibrée. C’est pourquoi leur annulation provoque en même temps soulagement et tristesse. Ce soulagement, je l’aime bien pour ce qu’il raconte de moi. Je voudrais être téméraire, aventureuse, audacieuse, à la limite de l’inconsidérée. Me prouver que je vais jusqu’au bout des choses (alors que, soyons sincères, jusqu’ici je vais surtout jusqu’au bout de mes burn-outs). Mais s’il est une chose que je n’ose pas encore faire, c’est m’arrêter et reculer avant que tout se casse la gueule (« me » casse la gueule ?). Est-ce mon caractère, mon éducation ou la pression que je pense subir du reste du monde (ersatz de l’adolescence, bien sûr) qui me pousse à rentrer la tête dans les épaules et foncer coûte que coûte ? Ou est-ce plutôt ma répugnance à regretter le temps investi ? Parce qu’il y a de ça aussi. Quand tu as bossé pendant des semaines pour quelque chose et que, voyant que ça ne mène nulle part, tu décides de l’annuler, peux-tu accepter avoir bossé pour… rien ? Combien de fois encore devras-tu te retrouver devant une assemblée clairsemée, peu intéressée, avant d’admettre que tu aurais dû tout annuler ? Est-ce que tu peux encore décemment prétendre que c’est ton excellente gestion de l’échec qui te rend hardie, alors que le simple fait que tu considères ces moments comme étant des échecs en dit déjà long sur ton état d’esprit ? Quand accepteras-tu de ne pas aller jusqu’au bout d’une tâche pour un peu plus de sérénité ? Quand accepteras-tu l’image que ça te renvoie de toi-même ? Alors que si quelque chose d’autre te libère de ton stress (et de toi-même), tu n’as plus à assumer ce choix et tu peux alors tranquillement observer ta tristesse, sans passer par la case culpabilité. « Novelmuttum » me soigne un peu de mes névroses. En lisant les propositions des autres personnes, je vois que la définition peut se décliner en nombreuses variations. Au gré des Novelmuttum, les exemples de mes comparses s’étoffent, dévoilant un nuancier abondant de sentiments et si pour unetelle la définition est mélancolique, pour tel autre elle peut être amusante, à la limite du bonnard. "Sentiment qui, lorsque quelque chose est annulé, mêle à la fois un peu de tristesse et à la fois un peu de soulagement."Acoolnullé Mot mésinterprété par d’autres participant·es – que nous ne nommerons pas – comme étant un verbe signifiant : « Annuler quelque chose pour raison de gueule de bois »
Ou encore : « Action de s’alcooliser suite à l’annulation d’un événement »
Il fut aussi pris comme adjectif, un peu plus proche de notre définition initiale et pouvant dire « « Être soulagé·e d’une annulation qui permet de soigner sa gueule de bois » :
En réalité, nous avons toutes et tous manqué d’attention. En effet, la graphie du mot proposé cause un effet d’optique et si on l’observe de plus près, on constate que c’est notre esprit dérangé qui y a ajouté un « L » qui ne s’y trouve pas : Le mot proposé était : AC-OOL-NUL-LÉ qu’on pourrait découper comme suit : « Ah cool – nullé » et non pas : AL-COOL-NUL-LÉ qu’on entend volontiers comme : « Alcool – nullé » Et donc, ce mot, acoolnullée répond tout à fait à la définition du Novelmuttum IX :
Pesaile (adj.)
Grévirement (n. m.)
Tristoulagé·e (adj.)
Frustragement (n. m.)
Lavitristé·e (adj.)
Soulaception (n. f.), Soulaçu·e (adj)
Exancolique (adj.)
Contriste (adj.)
« C’est pas contr’ toi Je suis contriste Un sentiment minimaliste T’avais promis encore une fois Que tu m’garderais dans tes bras Mais j’me doutais, c’est bien normal Qu’encore une fois tu m’ferais mal Alors j’veux pas être alarmiste Mais ton p’tit tour d’abstentionniste N’aura aucun effet sur moi Même si à nouveau t’es pas là Je ne seras plus que contriste De mon cœur t’es l’anésthésiste … » Lumébrence (n. f.), Lumèbre (adj.)
Déçoufance (n. f.), Déçoufu·e (adj.)
Rester ou être moitié-moité (expression)
Merci infiniment à Yvan Peperoni, Simran Singh, Steven Matthews, Mohamed Musadak, Maï Beti Hitomi, Djeemee Gurtner, Cedric Annen, Yannick Rossy, Lyvia Papilloud, Anna-Kat Mörike et David Marin de m'avoir prêté un bout de votre imagination!
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À quoi ça blogue?Quand ça passe par ma tête et que ça persiste assez pour être transmis à la main. Catégories
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